Salon du livre de Bruxelles :
Cette rencontre-là sera trace, différemment encore.

Comment décrire une première dédicace dans un lieu aussi incontournable de l'édition belge et étrangère ?
   

J'étais un peu fébrile à l'arrivée sur le site de Tour et Taxis, la valise remplie de ma très précieuse cargaison, une série de Fleur de Poésie, Source de Vie bullée et scotchée à fond de cale.  Le passage par l'entrée des auteurs, la remise du badge et  me voilà propulsée dans l'univers impitoyable du monde de l'édition !
 
Arrivée à l'avance, je prends le temps de me balader dans les expos, une fois mon colis encombrant déposé au modeste stand TheBookEdition.  Evidemment, au premier coup d'œil, on ne peut rater les grandes éditions françaises venues massivement créer de véritables librairies éphémères. (J'apprendrai quelques mois plus tard le sort tragique réservé à la plupart des invendus, à savoir leur pilonnage sans autre forme de procédure.) Je m'attarderai pour ma part à la fondation  du poète belge Maurice Carême tenu par Jeannine Burny, sa muse et sa mémoire. (Et là, pas question de pilonnage...) Mon compagnon me houspille un peu, après mon achat : Allez, Sandra, tu vas bientôt avoir ta place ! Il faut t'installer ! 
  
L'atmosphère est particulière, presqu'électrique, car Amélie Nothomb arrive bientôt pour son dernier ouvrage annuel "Barbe bleue". Malheureusement, pas le temps pour recevoir de ses mains une dédicace que j'aurais pourtant bien appréciée.
  
Les choses sérieuses commencent : installation au stand, un petit café - merci l'équipe - et me voilà fin prête. L'attente bien sûr, évidemment, incontournablement. Je n'ai pas 100 lecteurs qui patientent, mais j'espère une rencontre et une dédicace. Modeste ambition, mais réaliste pour une plume nouvelle.
  
Entre temps, papotage et échanges avec l'équipe et les deux autres autoéditeurs présents. Des parcours, des univers et des rêves différents, mais une même passion : l'écriture. Un moment convivial et chaleureux qui permet d'éclipser le temps.
   
Et puis... l'Echange... de ceux qu'on n'attend pas...  finalement ! 
 
J'avoue : j'ai l'art de me faire des "films" des jours à l'avance. "Ce sera une vieille dame avec un grand imperméable et une écharpe rouge, un sac rempli de bouquins, à moins que ce ne soit un monsieur, chapeau vissé sur la tête, voix grave d'universitaire ou encore un quidam à lunettes perdu et qui demande la sortie... La sortie ? Pourquoi la sortie ?"  0-0 
 
Eh bien non !  La vie n'est pas un cinéma : elle est mieux que cela ! C'est une charmante jeune femme qui partagera, l'aura d'un instant, une conversation avec moi. Un quart d'heure de bonheur. Une occasion de parler de mon modeste parcours d'écriture, du réseau Arts et Lettres, de mon poème à l'expo de la peintre abstraite lyrique Liliane Magotte, de mes inspirations... De mes fardes sous mes pieds, je sors panneaux, photos... Le sac de Mary Poppins ! Elle pose des questions : "Depuis quand écrivez-vous ? Pourquoi la poésie ?" Elle compulse le livre, grappille un passage ou l'autre, apprécie un poème où "tout coule" et montre un intérêt certain pour mes néologismes et détournements. Elle lit à voix haute un extrait :"d'un vallon aux taires réinventés", le répétant par deux fois. Mes vers lus par une inconnue ainsi, simplement, sans préparation, sans déclamation, mais chaque  mot savouré comme un bon morceau de chocolat belge. A moins qu'elle n'aime pas le chocolat !  Elle sourit, semble apprécier aussi ce moment. Elle tourne le livre, regarde le prix, ouvre son portefeuille, mais elle n'a plus de monnaie sur elle. Fin de journée. "Vous savez s'il y a un distributeur quelque part ?" Non, je ne sais pas. "Je vais chercher... Peut-être à la sortie ?..."  0-0  Oui, peut-être...
 
Finalement, elle n'achètera pas le livre, mais qu'importe ! Je ne vends pas des savonnettes, j'offre des mots. Les paroles échangées resteront mon plus beau cadeau du jour. J'avoue aimer les dédicaces pour ces instants-là, très particuliers.  Il y a toujours une surprise au bout du voyage. Certains se plaignent, disant que c'est long, ennuyeux, incontournable ou pas ! "Je n'ai rien vendu, j'ai perdu mon temps, quelle galère  !!!" Mais voyons, chaussons nos lunettes arc-en-ciel : le véritable plaisir de l'auteur n'est-il pas aussi ce partage impromptu avec un lecteur ? Cette anecdote n'est-elle pas en soi la merveille de l'écriture et de la lecture ? Ce moment ne résume-t-il pas tout ce qui peut relier les êtres entre eux à travers les mots ?
    
Le geste ample de la main d'une signature se fera ce jour-là et avec plaisir pour une autre personne, mais cette rencontre-là sera trace, différemment encore.

Je quittai ainsi  mon stand ravie, direction un bon petit resto bien mérité. Et je garde dans mes malles secrètes le badge, souvenir d'une journée mémorable où une perle s'est déposée dans un fatras commercial sans nom.

Eh oui, je suis poète !   ;-)


 43ème Foire du Livre de Bruxelles - 09.03.2013 - stand 120 -





Sandra Dulier, 
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